07/08/2020
Canada

Projet de forages dans une zone marine protégée

Au moment où le gouvernement Trudeau s’associe à une démarche menée aux Nations unies et s’engage à protéger 30 % des milieux marins du Canada d’ici 2030, il évalue un projet de forages pétroliers dans une zone protégée pour respecter ses engagements internationaux de conservation des océans. Disant s’appuyer sur la "science", Ottawa juge que cette recherche d’énergie fossile peut être compatible avec la préservation des écosystèmes.

Le gouvernement fédéral a annoncé se joindre à l’Alliance mondiale pour les océans "afin de contribuer à galvaniser les efforts internationaux en vue d’atteindre un objectif de conservation de 30 % qui permette au milieu marin et aux économies marines durables de prospérer". L’Alliance espère faire adopter cet objectif lors de la prochaine rencontre des pays membres de la Convention sur la diversité biologique des Nations unies. De fait, le gouvernement fédéral protège déjà environ 14 % de ses vastes milieux marins, grâce à la création de refuges marins, qui comptent pour 4,93 % de son territoire maritime. On les retrouve dans différentes régions, dont le golfe du Saint-Laurent, mais aussi le long de la côte Est. Le plus vaste refuge marin situé au large de Terre-Neuve a une superficie de 55 353 kilomètres carrés et il est désigné sous le nom de "Fermeture du talus nord-est de Terre-Neuve". Il a été établi en avril 2019 dans le but de "protéger les coraux et les éponges et [de] contribuer à la conservation et à la biodiversité à long terme", selon ce que précise Pêches et Océans Canada. Le ministère ajoute que ce secteur est associé à "une zone d’importance écologique et biologique qui soutient une grande diversité, y compris plusieurs espèces en déclin". Toutefois, c’est bien cette zone protégée qui pourrait faire l’objet d’une campagne de forages pétroliers au cours des prochaines années, a constaté Le Devoir. La compagnie BHP Canada, qui possède deux permis d’exploration qui chevauchent ce refuge marin, souhaite y mener un total de 20 forages d’ici la fin de la décennie. Le projet, qui a été déposé deux mois après la création du refuge marin, est actuellement analysé par l’Agence canadienne d’évaluation environnementale. Ce projet de BHP Canada dans ce refuge marin situé au large de Terre-Neuve pourrait même ne pas être le seul. La pétrolière BP, responsable de la marée noire du golfe du Mexique en 2010, possède quatre permis d’exploration dans cette zone protégée. Mais pour le moment, aucun projet n’a été présenté. Deux autres projets totalisant 38 forages des entreprises Chevron et Equinor, situés tout près du refuge marin, sont par ailleurs en cours d’évaluation fédérale. En réalité ces projets de forages ne seront plus obligés à l’avenir de passer par le processus normal d’évaluation environnementale, le gouvernement Trudeau ayant annoncé en juin qu’il exempte tous les forages exploratoires réalisés en milieu marin au large de Terre-Neuve du processus qui était jusqu’ici en vigueur. Ottawa, qui veut ainsi accélérer la réalisation des projets, souligne que la relance économique passe par un secteur pétrolier "fort, résilient et novateur". Tout est dit.

Tous les détails dans l’article de Alexandre Shields – Le Devoir